Plus contagieux que la lèpre : l’amour

 

Si je vous dis « Hawaï », peut-être pensez-vous aussitôt « Police d’état ». Cette série télévisée peut nous captiver et sous certains angles nous faire rêver. Par-delà la ville d’Honolulu sur l’île d’Oahu, la caméra se plaît en effet à nous faire admirer cet archipel aux îles multiples.

 

Si je vous dis « Molokaï »− l’une des 137 îles de cet archipel − avec son village de « Kalawao », pensez aussitôt au Père Damien, l’apôtre des lépreux. Ce prêtre de la Congrégation des Sacrés cœurs de Jésus et de Marie fut béatifié par Jean-Paul II le 4 juin 1995, puis canonisé par Benoît XVI le 11 octobre 2009. En cette journée mondiale des lépreux, voilà un beau modèle à admirer, un bel exemple à méditer.

 

Envoyé en mission auprès des lépreux en 1864 dans cette île lointaine de l’océan Pacifique, il se livre sans compter à ces parias de la société. Sur ceux qui habitaient dans ce lieu de l’ombre et de la mort, une lumière se lève. Oui, ces êtres humains, véritables rebus de l’humanité, voient en ce prêtre catholique se lever pour eux une grande lumière. Le Père Damien leur porte le Christ et rend ainsi l’amour plus contagieux que la lèpre. Molokaï, enfer aux yeux des hommes, est pour ce missionnaire un lieu de bonheur … tout simplement parce que, dit-il, « quand on sert Dieu, on est partout heureux ». En 1885, il écrit à son Supérieur : « Eh bien, mon révérend Père, il n’y a plus de doute pour moi, je suis lépreux. Que le bon Dieu soit béni. Ne me plaignez pas trop ». Et encore : «Étant sûr que la maladie est réelle, je reste calme et résigné et je suis même plus heureux parmi mon monde. Le bon Dieu sait ce qui est mieux pour ma sanctification et dans cette conviction je dis tous les jours un bon « fiat voluntas tuas ». …/… Au fur et à mesure que la maladie avance, je me trouve heureux et content à Kalawao. …/… je me vois être le missionnaire le plus heureux du monde ».

 

Voilà donc le beau témoignage d’un homme qui s’est laissé séduire par l’Appel du Seigneur, qui est allé jusqu’aux périphéries rejoindre les plus exclus, et qui a vécu de la joie de l’Evangile pour la faire resplendir.

 

Parlant de cet apôtre que fut le Père Damien, Gandhi a pu écrire : « Si l’assistance aux lépreux est tellement chère au cœur des missionnaires catholiques, c’est parce qu’aucune autre œuvre n’exige, comme elle, un esprit de sacrifice. Celle-ci exige l’idéal le plus élevé, l’abnégation la plus parfaite. Le monde de la politique et du journalisme ne connaît pas de héros dont il peut se glorifier et qui soit comparable au Père Damien de Molokaï. L’Église compte parmi les siens des milliers d’hommes qui, à son exemple, ont sacrifié leur vie au service des lépreux. Il vaudrait la peine de rechercher à quelle source s’alimente un tel héroïsme. »

 

Un autre grand homme a été marqué par le Père Damien ; c’est Raoul Follereau qui, à son tour, s’est fait l’apôtre des lépreux. Il écrivait : « Un homme, un pauvre tout seul, mais dont l’héroïque bonté exaltait les cœurs, a fait honte aux égoïstes et aux lâches. Aujourd’hui, parce que le P. Damien vécut avec les reclus, parce qu’il reçut d’eux la lèpre et mourût dans leur bras, l’île de l’Amitié (Molokaï) est devenue terre d’espérance. Ils étaient plus de mille, lorsqu’il débarqua à Molokaï. Et il n’avait rien à leur donner, que son amour. Mais, c’est de cela surtout, de cela d’abord, dont ils avaient besoin… L’Amour, toujours l’Amour, l’Amour seul qui fait tout ! »

 

Nous avons nos lépreux : ceux qui nous répugnent, qui sont sales ou grossiers … ceux pour qui nous avons de l’amertume et de la rancune … ceux que nous fuyons et repoussons … ceux qui sont insupportables et que personne ne veut plus côtoyer etc … ceux dont nous nous tenons à distance et que nous isolons dans leur petite île. Ne sommes-nous pas appelés ? Ne devons-nous pas sortir jusqu’à ces périphéries ? N’est-ce pas là un chemin de bonheur ? L’amour n’est-il pas plus contagieux que toutes les formes de lèpres ? Alors donnons l’Amour, toujours … encore et toujours.

 

Père Gilles Morin

Curé

Oui à Jésus ; oui à l’accueil ; oui à la vie

 

Quelle bonne nouvelle que celle portée par l’ange aux bergers de Bethléem ! Bonne Nouvelle pour eux ! Bonne Nouvelle pour nous ! Bonne Nouvelle pour tous … ou presque tous ! En tous pays et continents, la joie de la Nativité du Sauveur a résonné dans les cœurs. Si les chrétiens connaissent des divisions qui font scandale, ils s’unissent pourtant et profondément sur cet événement central de l’histoire de l’humanité. « La lumière est venue dans le monde » ; ils le savent, et ils l’ont accueillie. « Un Enfant nous est né, qui est le Sauveur » ; ils le savent, mais ils n’oublient pas ceux qui s’en distancent, le rejettent et le réfutent. La vie est en Dieu, elle est don de Dieu. Sacrée , elle doit être respectée ; ils le savent, et ensemble se mobilisent. « Tous unis par la Vie qui est Jésus-Christ ; tous unis pour la vie » : telle pourrait être leur commune devise.

 

La VIE est attaquée, ridiculisée, raillée, agressée… pour le bien de qui ? Sans  La LUMIÈRE, c’est l’obscurité ; sans L’AMOUR, c’est la spirale de l’individualisme et de la haine. Sans L’Enfant, pas d’avenir … et pour le bien de qui ? Nous le savons, La Vie, la Lumière, l’Amour, l’Enfant, c’est Jésus-Christ. Aujourd’hui encore, on cherche à supprimer Jésus … mais pour le bien de qui ?

 

Les médias n’ont guère donné écho à ce fait scandaleux et attristant de l’intrusion d’une femme aux seins nus (une Femen) dans l’église de la Madeleine, peu avant Noël.  « Je portais, confirme-t-elle, un voile bleu orné d’une couronne de fleurs et tenais deux morceaux de foie de bœuf dans les mains, symbole du petit Jésus avorté. Étaient peints sur mon torse et dans mon dos les slogans « 344e salope » …/…, en référence au manifeste des 343 initié par des féministes pro-avortement en 1971, et « Christmas is canceled » (Noël est annulé). Après quelques pauses devant les photographes de l’AFP, j’ai laissé le saint fœtus sanguinolent choir au pied de l’autel et nous avons quitté l’Église ». Son objectif avoué était de protester contre l’Eglise qui s’oppose à l’avortement. Pauvre femme ; elle doit être bien blessée pour agir ainsi … et pour le bien de qui ? Prions pour elle. Qu’on le veuille ou non, il y a un lien étroit entre Jésus et la vie. Supprimez l’Enfant-Dieu ; alors l’humanité sera portée à massacrer ses propres enfants ; Tuez les enfants innocents et sans voix dans le sein de leur maman ; alors l’humanité sera conduite à se débarrasser de l’Enfant-Dieu ». C’est pourquoi, les différentes confessions chrétiennes peuvent affirmer : « Tous unis par la Vie qui est Jésus-Christ ; tous unis pour la vie ».

 

Nous nous souvenons du pape Jean-Paul II prônant « la culture de vie » face à « la culture de mort ». Notre pape François, quant à lui et dans la même lignée, s’oppose à « la culture du rejet » et encourage « la culture de l’accueil et de la rencontre ». C’est ce qu’il a répété dans son message à l’occasion de cette 100ème journée mondiale des migrants et des réfugiés. Comme tant de nos frères exilés, pourchassés, déracinés et trop souvent exploités, de nombreux enfants à naître ressentent la crainte et sont destinés à être expulsés mortellement du ventre de leur mère. L’Eglise n’a-t-elle pas mission d’être la voix qui s’élève, le refuge de ces petits innocents ? Comment peut-on le lui reprocher ?

 

Père Gilles Morin

Curé