De beaux raisins : ils sont à toi, ils sont pour toi

 

Le maître avait planté une vigne. Il l’avait choyée, mise à part. Qu’elle était belle, comme nulle autre ! Il y était chez lui, toujours. Tout y était pour lui, toujours. « Viens ! disait la vigne à son maître. Viens ! tu es chez toi, je porte de beaux raisins pour toi ». Quand l’heure fut venue, le maître envoya son serviteur Gabriel, et la vigne répondit joyeusement « Fiat ». Oui, quand les temps furent accomplis, le Maître envoya son Fils Jésus en cette vigne vierge qui n’était autre que Marie. Celle-ci se saisit de l’Enfant non pour le malmener, moins encore pour le tuer, mais pour le porter en son sein, pour le blottir contre son cœur, pour lui prodiguer ses trésors de tendresse et d’amour, pour lui offrir tout ce qu’elle avait, tout ce qu’elle était, son corps et son âme, ses biens intérieurs et extérieurs, et la valeur même de ses bonnes actions passées, présentes et futures. « Donnes, lui dit Jésus, donnes encore et toujours, tes grappes sont pour le Maître, elles sont pour tous ». Et Marie courut ! Elle partit en hâte chez sa cousine Elisabeth ; elle se rendit à Bethléem pour offrir au monde le « fruit béni de ses entrailles ». Ce fut l’aurore de notre salut.

 

Le maître avait planté une vigne. Elle était belle … petite mais belle ; belle parce que petite. Elle exultait, chantait et dansait, tant elle s’émerveillait d’être choyée par Celui qui l’aimait. Sa joie : faire plaisir à son maître. « Il demande tout, tout, tout, disait-elle ; Eh bien ! tout sera pour Lui, tout ». Cette vigne si attirante et si rafraîchissante, c’était la petite Thérèse de l’Enfant-Jésus. Oh oui ! Jésus se sentait si bien en son cœur ! Il y trouvait toujours de si belles grappes, de beaux raisins … les raisins de l’amour. Dans la cellule de son carmel de Lisieux, n’avait-elle pas gravé ces mots : « Jésus, mon unique amour » ? Pour elle, il n’y avait qu’une seule chose à faire, c’était d’aimer Dieu, « d’aimer Jésus de toute la force de son cœur et de lui sauver des âmes pour qu’il soit aimé «  …  « O faire aimer JÉSUS ! », s’écriait-elle. Et pour le faire aimer, elle était prête à toutes les folies, à tous les sacrifices. Par Lui, avec Lui et en Lui, son âme brûlante de désirs infinis s’envolait jusqu’aux extrémités de la terre. C’était vraiment une vigne magnifique que la petite Thérèse qui, aujourd’hui encore, passe son ciel à faire du bien sur notre terre.

 

Le maître a planté une vigne, celle de notre cœur. N’a-t-il pas pris grand soin de nous ? Pouvait-il faire pour nous plus qu’il n’a fait ? Il attend donc de beaux raisins mais que trouve-t-il, que reçoit-il ? Lorsqu’il vient jusqu’à nous par la voix de l’Eglise, comment est-il accueilli ? … toujours par notre fiat ? Lorsque Jésus descend en notre cœur en chaque eucharistie, sommes-nous dans la joie de tout lui offrir « pour la gloire de Dieu et le salut du monde«  ? Il demande tout ; alors ne lésinons pas : donnons-lui tout. En ce mois d’octobre qui est à la fois le mois du rosaire et le mois missionnaire, il nous faut vivre la joie du don qui n’est autre que celle de l’amour. Finalement, c’est si simple, il n’y a qu’une seule chose à faire : Aimer Dieu et le faire aimer. La Vierge Marie l’avait compris ; la petite Thérèse aussi ; et nous ? … oui, et nous, l’avons-nous vraiment compris ?

 

Père Gilles Morin

Curé

Mieux que  » Plumieux « 

Cet été, ce jour-là, il faisait chaud dans ma belle région de Bretagne. Eh oui ! cela arrive parfois, même au mois d’août. J’étais en voiture, sans GPS, pour me rendre à l’abbaye N.D. de Timadeuc. J’étais tout près du but, je le savais, mais j’étais perdu. Arrivé dans le petit village de Plumieux, je dus donc m’arrêter sur la place de l’église pour demander ma route. L’homme auquel je m’adressai ignorait jusqu’au nom de cette célèbre abbaye. Il n’était installé à Plumieux que depuis peu. Faute de pouvoir me renseigner, il m’invita à le suivre jusqu’au bar. J’entrai donc à sa suite dans ce bar où une petite dizaine de personnes étaient déjà accoudées au comptoir.

–          « Bonjour !

–          Bonjour ! »

À ma grande surprise, chacun s’avança spontanément vers moi pour me tendre une main chaleureuse que je m’empressai d’étreindre. Le tenancier du bar connaissait bien l’abbaye de Timadeuc et m’indiqua sans hésitation le chemin. On m’offrit mon café et l’on commença à parler. Peu après entrèrent trois adolescents d’une quinzaine d’année. Les deux garçons serrèrent la main à tous … donc à moi. La fille fit la bise à tous … donc à moi. J’étais impressionné par la qualité et la spontanéité de cet accueil. En ressortant, j’en fis part à cet homme qui m’avait fait entrer dans ce lieu et le remerciai chaleureusement.

«- C’est cette atmosphère très sympathique qui m’a fait m’installer dans ce village », me confia-t-il.

Je repris la voiture et, munis des renseignements qui m’avaient été fournis, j’arrivai sans peine à cette belle abbaye de N.D. de Timadeuc. Là, en présence du Seigneur, je me fis un devoir et une douce joie de prier pour ces bretons qui m’avaient si gentiment traité comme un ami et comme un frère. J’étais pour eux un étranger et ils m’avaient accueilli ; j’avais soif et ils m’avaient donné à boire ; j’étais perdu et ils m’avaient guidé. Peut-être ne le savaient-ils pas, mais ce qu’ils avaient faits pour moi, c’est au Christ qu’ils l’avaient fait …

 

Ce souvenir de vacances me revient à l’esprit en ce dimanche de notre fête de rentrée. En guise d’accueil, peut-on faire mieux que Plumieux ? À nous de relever ce défi. À nous de dire en toute vérité :

« Bonjour à vous les nouveaux arrivants » mais peut-être aussi « bonjour à vous qui venez depuis des mois voire des années à N.D. de Nazareth et que je ne connais pas, et qu’habituellement je ne salue pas. Venez, entrez, je suis là pour vous accueillir. Dans la maison de mon cœur, vous êtes chez vous … tous … sans exception, sans exclusion, à commencer par les plus égarés, les plus  petits, les plus souffrants et les plus pauvres. Venez, entrez, je vous tends la main, je vous embrasse affectueusement, je vous donne à boire l’eau vive de l’amour que le Seigneur a déversée dans mon cœur. Elle n’est pas seulement pour moi, elle est pour vous. Vous cherchez votre route ? Eh bien  je vous indiquerai le chemin qui n’est autre que  » Jésus ». Plus encore, je vous accompagnerai pour qu’ensemble nous parvenions à l’abbaye céleste qui n’est autre que le Paradis ».

Bonne fête de rentrée à tous ! Puissions-nous nous accueillir les uns les autres comme le Christ nous accueille en chaque Eucharistie. Alors, sans nul doute, notre paroisse sera mieux que plumieux et la splendeur de l’abbaye de Timadeuc fera pâle figure lorsque nous parviendrons au Paradis.

 

Père Gilles Morin

Curé