Le préférer à tout

Elles se prénomment Ida, Fulgence, Matondo et Hortense. Elles sont africaines ; vous ne les connaissez pas. En ce dimanche de rentrée, elles sont pourtant si proches de nous, géographiquement et spirituellement. À quelques rues de N.D. de Nazareth, en cette œuvre magnifique de la maison Sainte Germaine, elles s’offrent à Dieu sans réserve par leurs vœux perpétuels de chasteté, pauvreté et obéissance dans la congrégation des Sœurs Hospitalières du Sacré-Cœur de Jésus. Elles ne sont ni inconscientes ni insouciantes. Tout au contraire ; à l’approche de ce grand événement, plusieurs mois durant, elles se sont “assises“ pour prier, discerner et voir “si elles avaient de quoi aller jusqu’au bout“. Nous nous unissons à leur oblation ; nous vibrons à leur action de grâce.

 

L’évangile de ce dimanche trouve en Ida, Fulgence, Matondo et Hortense une résonnance particulière. Elles préfèrent effectivement le Christ à leur père, leur mère, leurs frères et sœurs, leur pays et même leur propre vie. Mais ne nous y trompons pas ; les exigences posées par Jésus s’adressent à « de grandes foules ». Comme le soulignait le Pape Jean-Paul II,  « dans la vie consacrée, il ne s’agit pas seulement de suivre le Christ de tout son cœur, en l’aimant “plus que son père ou que sa mère, plus que son fils ou que sa fille“, comme il est demandé à chaque disciple, mais de vivre et d’exprimer cela par une adhésion qui est “configuration“ de toute l’existence au Christ ».

 

Comme vous le savez, nous sommes dans la dynamique de « Paroisses en mission ». Notre archevêque, le Cardinal André Vingt-Trois a retenu pour thème de cette année pastorale celui de « la famille et la jeunesse : une espérance ! » Ce premier éditorial de septembre pourrait donc légitimement vous surprendre. Pourquoi le faire porter sur la Vie Consacrée ? Mon intention n’est pas seulement circonstancielle. Notre paroisse a la caractéristique d’être animée par des Religieux de Saint Vincent de Paul, Pères et Frères. Vous pouvez tous voir et ressentir l’attention particulière que nous portons aux familles et aux jeunes. Ils sont au cœur de notre charisme de fondation. Quelles familles et quels jeunes pourraient être véritablement rayonnants et porteurs d’espérance s’ils se laissaient glisser dans l’hédonisme, s’enlisaient dans le matérialisme  ou sombrait dans l’anarchie ? Le témoignage de la Vie Religieuse est donc un trésor et une force ; c’est « une bénédiction pour la vie humaine et pour la vie de l’Eglise elle-même ».  Merci à Ida, Fulgence, Matondo et Hortense de nous le rappeler dès le début de cette nouvelle année pastorale.

 

Père Gilles Morin

Curé

D’abord Toi, … et tout de suite

Le Seigneur t’appelle, pourquoi attendre ? L’Amour te tend les bras, pourquoi ne pas t’y précipiter ? Le Christ te dit : « Viens  … maintenant »,  pourquoi différer et tergiverser ? Jésus pose sur toi son regard comme il le fit un jour sur un jeune homme riche ; il t’invite à tout lâcher pour mettre tes pas dans ses pas ; veux-tu t’exposer à repartir tout triste. N’est-il pas la perle précieuse qui mérite de tout vendre pour l’acquérir ? Alors pourquoi zigzaguer et esquiver ? Oui, pourquoi aligner les « peut-être », les « plus tard », les « si » et « à condition que » ? Pourquoi traîner les pieds au lieu de t’écrier  avec l’apôtre Paul : « Saisi par le Christ Jésus, je cours droit, tout droit vers le but » ? Pourquoi donc aller d’atermoiement en atermoiement pour finalement caler et reculer.

 

Situons-nous à un autre niveau : Ce jeune homme ou cette jeune fille t’aime et te tend les bras. « Je t’aime », lui réponds-tu ? Mais alors, pourquoi éluder la question de l’engagement dans le mariage ? « Je te suivrai partout où tu iras » lui assènes-tu ? Alors pourquoi aligner des « plus tard », des « si », des « à condition que » à n’en plus finir ? Pourquoi multiplier les « d’abord » au point de les faire passer avant celui ou celle que tu prétends aimer ? Pourquoi, si ce n’est par ce que tu n’es pas encore véritablement saisi par l’Amour, parce que tu n’aimes pas assez, parce que tu n’aimes pas plus que tout.

 

Hier, à la Cathédrale Notre-Dame de Paris, 9 nouveaux prêtres ont reçu l’onction sacerdotale. Eux se sont laissé saisir par le Christ au point de vouloir le suivre jusqu’au bout, au point d’en être désormais comme une icône vivante, au point d’en prodiguer son enseignement et d’en déverser ses grâces sur notre humanité. Leur  oui a été oui, leur « je t’aime, Seigneur » a été un vrai « je t’aime », sans « peut-être », ni « plus tard », ni « si » ni « à condition que ». Aujourd’hui, ils sont prêtres pour l’éternité.

 

Hier, nous étions nombreux à aller jusqu’à eux en ce jour solennel de leur ordination sacerdotale. Aller vers le prêtre, c’est aller vers Jésus. Les grandes vacances s’ouvrent. Saurons-nous, là où nous sommes, garder le souci d’aller vers le prêtre, nous démener pour y parvenir, nous organiser pour le trouver, nous motiver pour en faire une priorité ? Que seraient nos vacances si à l’appel du Seigneur à vivre dans son intimité, nous répondions « permet-moi d’abord … laisse-moi d’abord… » … « Toi, plus tard … Toi, après … ». Ce serait avouer dans les faits que nous ne l’aimons pas assez, que nous ne l’aimons pas plus que tout. A nous de rester dans l’élan de notre année pastorale qui nous a fait chanter et répéter : « Je vous aime ô mon Dieu, et mon seul désir est de vous aimer jusqu’au dernier soupir de ma vie »… « jusqu’au dernier soupir de ma vie » donc à commencer par juillet et août.

 

Père Gilles Morin

Curé