« Eucharistie et Mission »

« Il n’y a rien de plus beau que d’être rejoints, surpris par l’Évangile, par le Christ. Il n’y a rien de plus beau que de le connaître et de communiquer aux autres l’amitié avec lui ». Cette affirmation acquiert une plus forte intensité si nous pensons au mystère eucharistique. En effet, nous ne pouvons garder pour nous l’amour que nous célébrons dans ce Sacrement. Il demande de par sa nature d’être communiqué à tous. Ce dont le monde a besoin, c’est de l’amour de Dieu, c’est de rencontrer le Christ et de croire en lui. C’est pourquoi l’Eucharistie n’est pas seulement source et sommet de la vie de l’Église; elle est aussi source et sommet de sa mission: « Une Église authentiquement eucharistique est une Église missionnaire ». Nous aussi, nous devons pouvoir dire à nos frères avec conviction: « Ce que nous avons contemplé, ce que nous avons entendu, nous vous l’annonçons à vous aussi, pour que, vous aussi, vous soyez en communion avec nous » (1 Jn 1, 3). En réalité, il n’y a rien de plus beau que de rencontrer le Christ et de le communiquer à tous. L’institution même de l’Eucharistie, du reste, anticipe ce qui constitue le cœur de la mission de Jésus: Il est l’Envoyé du Père pour la rédemption du monde (cf. Jn 3, 16- 17; Rm 8, 32). Au cours de la dernière Cène, Jésus confie à ses disciples le Sacrement qui actualise le sacrifice qu’il a fait de lui-même par obéissance au Père pour notre salut à tous. Nous ne pouvons nous approcher de la Table eucharistique sans nous laisser entraîner dans le mouvement de la mission qui, prenant naissance dans le Cœur même de Dieu, veut rejoindre tous les hommes. La tension missionnaire est donc constitutive de la forme eucharistique de l’existence chrétienne.

Benoît XVI : exhortation apostolique Sacramentum caritatis N° 84

L’amour de Dieu, vous en mettrez

Jésus, Toi l’Amour incarné sur notre terre, pourquoi t’abaisser, aller jusqu’à t’humilier, te laisser broyer, défigurer et crucifier ? C’est qu’il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis, et nous sommes tes amis. C’est que de ton cœur transpercé jaillissent les flots d’amour qui nous donnent la vie… Ta vie. Là est la coupe à laquelle nous voulons boire ; là se trouve l’eau et le sang dont nous voulons nous abreuver ; là se trouve le pain et le chemin de la gloire.

 

Jacques et Jean, vous les fils du tonnerre, pourquoi ambitionner de grandir quand Lui, votre maître, s’en va pour mourir ? Vous cherchez la gloire, vous trouverez la croix. Regardez Jésus, le grand prêtre par excellence. Un prêtre, c’est fait pour tout donner, s’immoler, se sacrifier. Vous voulez le suivre, il vous faudra servir, être comme Lui « broyé par la souffrance », faire de votre vie « un sacrifice d’expiation ». Il vous faudra l’aimer et le faire aimer.

 

Vous les missionnaires qui parcourrez le monde, pourquoi avoir tout quitté pour vous exiler ? Quelle est cette folie qui vous a saisis, ce feu qui vous a embrasés ? Vous êtes si nombreux à être aujourd’hui encore broyés par la souffrance, arrêtés, emprisonnés, mutilés, et sacrifiés. Vous ne  cherchez aucunement à grandir mais à servir. Vous désirez ardemment boire la coupe jusqu’à la lie ; vous êtes épris du martyre. Pourquoi donc un tel élan, une telle folie ? C’est que l’amour vous pousse et vous presse, l’amour de Dieu et l’amour de vos frères. Avec le curé d’Ars, vous vous écriez : « O mon Dieu ! mon Dieu ! que vous nous avez aimés ! ». Comment dès lors, ne pas s’embraser ? « Allez, mon ami, avait dit M. Courbon à Jean Marie Vianney. Il n’y a pas beaucoup d’amour de Dieu à Ars. Vous en mettrez ». Vous, les missionnaires, vous êtes allés jusqu’aux extrémités de la terre parce qu’il n’y a pas beaucoup d’amour du bon Dieu de par le monde … et vous en mettez.

 

Comme nous ressemblons à Jacques et Jean, prompts à nous enthousiasmer aux heures de gloire, vite démobilisés quand vient la croix ; ardents à parler, figés lorsqu’il faut s’engager. Notre quartier n’est-il pas une terre de mission ? En chaque eucharistie, Jésus nous montre son cœur transpercé : « « Voilà ce cœur qui a tant aimé les hommes ! » nous dit-il. Vois combien je vous ai aimés … tous … pas toi seulement, mais tous … ». Nous voyons sur l’autel la coupe du salut et le pain de la vie. Pouvons-nous véritablement nous en approcher si nous ne portons en nous le désir de ne rien épargner, de nous épuiser et de nous consommer pour témoigner à tous l’infini d’un tel amour. Lorsqu’au terme de la messe, le prêtre nous adresse l’ite missa est (Allez dans la paix du Christ), n’est-ce pas Jésus qui nous envoie : « Va ; nous dit-il, il n’y a pas beaucoup d’amour de Dieu dans ce quartier. Tu en mettras ».

 

Père Gilles Morin

Curé