Une langue déliée

 

Peut-être avez-vous eu l’opportunité de regarder une vidéo bouleversante venue d’Égypte il y a quelques mois. Des coptes – jeunes filles, jeunes gens puis enfants – y chantent leur Espérance et leur amour de Dieu dans leur église dévastée par une vague de haine ayant déferlé sur leur communauté chrétienne. Au milieu des décombres, leurs douces voix s’élèvent harmonieusement : Laissons-nous rejoindre par leur message ; ne restons pas sourd à leur témoignage ; alors nous pourrons nous faire à notre tour messagers d’espérance et de paix.

« Au milieu des larmes du cœur, des cendres, de la poussière et des blessures, chantent-ils,nous venons avec un message d’amour, de paix et de pardon pour le monde entier.…/…Notre foi est une alliance avec Notre Seigneur que rien au monde ne saurait ébranler…/…Nous le déclarons au monde entier : nos considérations ne sont pas les vôtres ;notre but c’est le royaume des cieux avec notre Seigneur de gloire.Ô mon église ta tête est relevée ; ô ma mère ta beauté est stupéfiante
Sonne les cloches. Réveille et rassemble tes enfants. »

Le 15 août, dans notre terre de France, les cloches ont sonné. Rappelez-vous, il était midi ; l’heure du plein soleil, signe de l’espérance plus forte que la mort. La « Fille aînée de l’Eglise » voulait ainsi exprimer sa profonde communion avec les chrétiens d’Orient, dans la conscience de leurs épreuves et dans l’admiration de leur foi. Ce mardi 8 septembre, fête de la Nativité de la Vierge, une conférence internationale se tiendra à Paris pour traiter de ce sujet. Les langues se délient ; ce vaste et douloureux sujet est enfin abordé.

 

Lui ne saurait ni chanter ni crier. Il gît, mort, sur le sable d’une plage. Il n’a pourtant que 3 ans. Sa photo a été reprise par l’ensemble des médias. Par-delà le choc émotionnel, elle nous lance un appel et nous livre un message au nom de ces milliers d’autres enfants, jeunes et adultes broyés par de multiples drames, trop souvent dans l’indifférence générale. Fallait-il en venir à un tel « électrochoc visuel » pour délier les langues, sortir du mutisme et oser enfin dénoncer toutes les atrocités. Il y en a tant et tant … tant d’autres dont on ne parle jamais.

 

L’évangile de ce dimanche nous relate la guérison d’un « sourd qui avait aussi de la difficulté à parler« . Notre humanité n’est-elle pas trop souvent frappée de surdité au point d’avoir bien de la peine à s’exprimer en toute vérité et liberté. En cette rentrée pastorale, nous ne pouvons ni fermer nos oreilles ni recroqueviller nos cœurs. Notre archevêque, le Cardinal André Vingt-Trois, nous le rappelle avec force. « Se défendre de faire quelque chose, nous dit-il, sous prétexte que ce que, moi, je peux faire, est sans proportion avec les besoins, cela revient à dire : je ne fais rien. Tout le monde ne peut pas faire des choses extraordinaires, mais tout le monde peut faire quelque chose ». Ces paroles prononcées à propos du drame de tant de migrants ne valent-elles pas aussi  au sujet d’un autre drame, bien différent certes, d’une autre tonalité, évidemment, mais pourtant bien réel lui aussi : celui de tant d’enfants qui grandissent sans Dieu. Parce que trop de chrétiens sombrent dans l’indifférence et l’oubli, parce qu’ils en viennent à être frappés de surdité spirituelle, leur langue ne se délient plus et le message de l’Evangile ne se propage plus. « Le catéchisme, nous rappellent nos évêques d’Île de France, c’est l’affaire de tous les membres de la communauté chrétienne ».

 

Alors, nous aussi, d’un seul chœur, nous voulons chanter notre espérance et notre foi :

« Notre but c’est le royaume des cieux avec notre Seigneur de gloire.

Ô mon église ta tête est relevée ; ô ma mère ta beauté est stupéfiante

Sonne les cloches. Réveille et rassemble tes enfants. »

 

Père Gilles Morin,

Curé

S’approcher de Toi pour se reposer en Toi

 

Pauvre femme, elle a tout essayé ; rien n’y a fait. Elle traîne toujours son mal. L’Evangile précise qu’elle a des pertes de sang depuis douze ans. En désespoir de cause, “cette femme donc, ayant appris ce qu’on disait de Jésus“, se fraie un chemin à travers la foule. Elle ne vise rien d’époustouflant ni de solennel. Son objectif : toucher le vêtement de ce rabbi. Elle ne cherche aucunement à attirer les regards. Non, c’est une voleuse … une voleuse de miracles. Elle en a la technique : Pour voler, il faut approcher et toucher, se fondre dans la foule, venir par derrière, dérober sans que personne ne s’en rende compte, puis s’en retourner l’air de rien en conservant l’anonymat.

 

Reconnaissons qu’à l’exemple de cette femme, nous avons notre lot de misères physiques, morales ou spirituelles que nous traînons parfois depuis bon nombre d’années. Nous avons dans certains cas l’impression d’avoir tout tenté, mais vers qui sommes-nous allés ? Nous sommes-nous vraiment approchés de Jésus avec humilité et foi pour nous faire “voleur de grâces“ ?

 

Durant les mois de juillet et août, nous serons nombreux à quitter Paris pour nous approcher de la nature, de notre famille, de nos amis. Puissions-nous aussi nous approcher du Christ qui est là, toujours présent. Peut-être devrons-nous surmonter bien des obstacles pour parvenir à trouver une messe, à l’étranger ou dans nos campagnes. Il faudra pourtant tout tenter, rien ne devra nous arrêter. En vacances aussi, il faut prendre soin de notre âme. Les dangers ne manquent pas ; les relâchements spirituels nous menacent. N’oublions donc pas cette femme de l’Evangile ; elle a simplement touché le vêtement du Christ Sauveur et elle s’en est trouvée guérie. Dans l’Eucharistie, nous pouvons non seulement voir et toucher Jésus, mais aussi le manger. Alors, ayons la foi : nous obtiendrons de nombreuses grâces … et même des miracles ? … et nos vacances seront un temps de réfection de nos âmes, donc de notre être le plus profond. « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en Toi » (Saint Augustin)

 

Père Gilles Morin

Curé