Une mission d’exception

 

Vous le savez sans doute : Il n’y a que trois personnes dont l’Église souligne liturgiquement la naissance sur terre, ce sont Jésus, Marie sa mère et Jean le Baptiste. On parle alors de leur nativité. On manifeste ainsi leur destin exceptionnel dans l’histoire du salut. Autant dire que la solennité de ce jour est vraiment solennelle. Elle va jusqu’à  primer sur le dimanche ordinaire et précède en degré la Nativité de la Vierge Marie (qui n’est qu’une fête et non une solennité). Pourquoi une telle place dans la liturgie de l’Église ? Remarquons que dans l’Evangile, la naissance du précurseur est, en elle-même pleine de solennité. Elle est annoncée, comme pour Jésus, par un ange. L’enfant naît d’une femme réputée stérile. De plus, un miracle l’accompagne : la parole est rendue à Zacharie qui s’empresse d’affirmer au sujet de son fils : « Son nom est Jean », c’est-à-dire « Dieu a fait grâce ». Oui, Dieu fait grâce à ces époux, mais plus encore à toute l’humanité : « le Royaume est là », » le Seigneur vient visiter son peuple », « c’est maintenant le moment favorable, le jour du Salut ». Le chantre de cette annonce n’est autre que le précurseur, Jean le Baptiste. « Que sera donc cet enfant ? » s’interrogent les gens de Judée ? Il a vraiment un destin d’exception. La préface de la messe nous le rappelle, livrant ainsi les motifs de cette solennité :

«Avant même de naître, il tressaillit d’allégresse à l’approche du Sauveur ; en venant au monde, il apportait une grande joie : il fut, de tous les prophètes, celui qui désigna le Messie, l’Agneau de Dieu ; dans les eaux qui devaient en être sanctifiées, il baptisa l’auteur du baptême ; enfin, il rendit au Christ le plus beau témoignage, le témoignage du martyre ».

Jésus lui-même l’affirme : « En vérité je vous le dis, parmi les enfants des femmes, il n’en a pas surgi de plus grand que Jean le Baptiste » (Mt 11, 11).

 

En ce dimanche, 14 enfants catéchisés en notre paroisse vont être baptisés. Ils ont de 8 à 11 ans. Le Seigneur les a formés dès le sein de leur mère. L’eau va couler sur leur front ; ils vont s’entendre appeler par leur prénom suivi de ces paroles « Je te baptise, au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit ». La joie va inonder leur cœur. Au plus intime de leur être sera enracinée cette certitude : « Oui, j’ai du prix aux yeux du Seigneur, c’est mon Dieu qui est ma force ». Que seront donc ces enfants ? Souhaitons leur un destin d’exception, non selon nos catégories humaines mais selon le projet de Dieu. Puissent-ils être à leur manière prophètes du Très-Haut et chantres de la Bonne Nouvelle du Salut.

 

La période estivale va s’ouvrir. Avec elle, notre communauté paroissiale va connaître une certaine dispersion, du moins géographique. Quel que soit notre nom, en nous et par nous, Dieu veut faire grâce. Par le Baptême, il a fait de chacun de nous une lumière pour les nations, pour que son salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre. Cette mission, n’en doutons pas, elle est d’exception.

 

Père Gilles Morin, curé

« Notre ambition, c’est de plaire au Seigneur »

 

Voilà ce qu’affirme l’apôtre Paul aux Corinthiens. Puisse-t-elle aussi être la nôtre. C’est sagesse.

 

J’ai passé mon enfance dans le 15ème arrondissement de Paris. Vers l’âge de 16 ans, avec toute ma famille, nous avons déménagé à Athis-Mons, dans l’Essonne, pour être plus vastement logé. L’une de mes sœurs qui avait alors 20 ans participa au concours de miss de la ville. Elle exulta d’être classée 2ème. Ce fut pour elle une page de son histoire, avec acclamations, festivités et une certaine gloire. Elle avait cherché à plaire aux hommes (pas de manière provocatrice ni sensuelle, rassurez-vous). Les années ont passé. Elle a aujourd’hui 59 ans et m’est très chère. Je la vois l’une ou l’autre fois chaque année et c’est toujours pour nous une joie de nous retrouver. Où est sa beauté physique d’antan ? Ma sœurette est aux antipodes du filiforme et des canons humains de la beauté. C’est maintenant une femme bien enveloppée au visage quelque peu ridé : Bref, pas de celle dont on prendrait la photo pour mettre dans les magasines. Pourtant, à mes yeux, elle reste attachante et belle de cette beauté du cœur parce que, justement, elle garde un grande cœur. Au fil des ans, la semence posé en elle par le Seigneur a germé et grandi. Les hommes ne sont guère porté aujourd’hui à poser sur elle leur regard, mais je sais que Dieu, Lui, la contemple et ne cesse de l’aimer. Elle plaît à son Créateur et Sauveur. Voilà l’essentiel.

 

Tout récemment, passant dans l’une des salles du patro, j’entendais un enfant de 11 ans se vanter auprès de l’un de ses camarades d’avoir des chaussettes « Nike ». C’est capital, pensez-donc… des chaussettes dont personne ne peut identifier la marque à moins de vous déchausser. Les marques … oui les marques qui multiplient au moins par trois le prix des vêtements. Mais il faut paraître. Les parents savent d’expérience combien ils doivent batailler sur ce point avec leurs enfants. On cherche à plaire aux hommes comme si leur regard nous donnait d’être valoriser et quasi d’exister.

 

« Nous cheminons dans la foi », dit encore l’apôtre Paul, et il ajoute : « nous cheminons sans voir ». Aujourd’hui, des jeunes de notre paroisse font leur profession de foi. C’est une célébration solennelle. Ils sont tout de blanc vêtus pour rappeler l’événement vital de leur baptême. Approchez-vous si vous le voulez, mais soyez sûrs que vous ne trouverez sur leur aube aucune marque de quelque grand couturier que ce soit. Leur engagement veut exprimer leur désir ardant de plaire non aux hommes mais au Seigneur. Ils font la promesse de vivre sous son regard. Ce qu’il y a au fond de leur cœur, vos yeux ne peuvent le voir. Tout comme moi, vous savez pourtant que c’est beau, que c’est grand, que c’est pur, que c’est saint. Vous le savez par la foi. Qu’en grandissant, ils ne s’écartent pas de ce qu’ils portent aujourd’hui au plus intime d’eux-mêmes et que toujours ils puissent affirmer en toute vérité : « Notre ambition, c’est de plaire au Seigneur ».

 

Père Gilles Morin, curé