« Le petit âne gris »

 

Je ne me cantonne pas aux seuls cantiques religieux. Il y a quelques années, un soir, alors que j’étais au volant de la voiture sur les pistes d’Afrique, je fredonnais l’un ou l’autre chant ayant marqué mon enfance, tels ceux de Hughes Auffray. Juste au détour d’un chemin surgît alors un âne, … un petit âne gris. Impossible de m’arrêter ; le choc fut inévitable. La voiture était cabossée, l’animal blessé, et moi bien secoué. Je repensai  spontanément à ces paroles que je fredonnais peu auparavant : « Cette vie honorable, un soir s’est terminé … ». Oui elle s’est terminée pour ce petit âne gris, non point « dans le fond d’une étable où il s’est couché » mais sur cette piste où je l’ai percuté. Pauvre petit âne gris ! Encore une fois, j’étais bouleversé. J’aime bien les ânes. « Qui se ressemble s’assemble », dit-on. Et je suis un peu un âne.

 

Après avoir repris ma route, ce soir là, je me suis remémoré « cette histoire que l’on m’a racontée. Du fond de ma mémoire, je vais vous la chanter ». Je ne puis m’en empêcher, tant elle est belle. Elle se passe non en Provence mais en Palestine.

 

C’était il y a deux mille ans. Il était alors un âne qui se rendait de Nazareth à Bethléem. Il portait une femme sur le point d’accoucher. Ô ! il avançait avec douceur pour ne pas trop les secouer.  Et Marie mit au monde l’Enfant-Dieu, Jésus. Et toi, mon frère l’âne, tu étais là à le réchauffer. Puis tu fus là encore à trotter au plus vite vers le pays d’Egypte pour sauver de la mort ce petit Jésus.

 

C’était il y a un peu moins de deux mille ans. Il y avait alors, près de Jérusalem, un petit âne attaché que personne n’avait encore monté. Et voici qu’il entendit ces quelques mots : « Le Maître en a besoin ». Quoi ! le Seigneur a besoin de moi, pauvre petit âne. Et l’animal se laissa détacher et conduire. Le Maître monta sur lui … Tous deux entrèrent triomphalement à Jérusalem au milieu d’une foule en liesse  qui s’écriait à n’en plus finir « Hosanna ! Hosanna au plus haut des cieux !».

 

Que devint-il par la suite, ce petit âne gris ? L’Evangile ne nous le dit. Il est sûr cependant qu’après avoir porté son Maître, il ne le renia pas, ne le malmena pas, ne le crucifia pas, comme le firent les hommes … comme il nous arrive de le faire nous-mêmes. Après la gloire du jour des Rameaux, il reprit son humble service quotidien sans plus faire parler de lui.

 

Que j’aime ces ânes de l’Evangile ! je voudrais leur ressembler tellement plus. Et vous ?

 

Voyez : Porter Marie et Jésus ; être là près d’eux, toujours, pour les admirer, les réchauffer et les protéger … n’est-ce pas magnifique ?

 

Voyez encore : S’entendre dire par le Maître : « J’ai besoin de toi », puis se laisser détacher et emmener, pour que Jésus soit acclamé tel un roi, n’est-ce pas chose inouïe ?

 

Alors, … juste ce petit conseil … aimez les ânes. Ils ont tant à nous enseigner.

 

Père Gilles Morin

Curé

« Je crois à la résurrection de la chair et à la vie éternelle. Amen ! »

 

J’étais récemment, un soir, invité chez une famille de la paroisse. Que j’aime me retrouver au moment de la prière et voir parents et enfants clore la journée, à genoux, pour se confier à Dieu. C’est toujours un rituel avec croix, statues, icônes, bougies allumées… C’est ce moment privilégié où tous, véritable Trinité d’Amour, proclament d’un seul cœur les merveilles de l’Amour.

 

Ce soir-là, je fus particulièrement impressionné. Avec le papa, la maman, la petite de 3 ans et demi, les deux garçons âgés de 5 ans et 6 ans et demi, me voici à genoux. Et le papa de commencer : « Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen ! ». Et d’enchainer : « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant … ». Je m’unis donc à cette récitation du Credo, et à  ma grande admiration, je constate que la famille, dans son entier, le proclame d’une seule voix … je dis bien d’une seule voix, y compris celle de la petite dernière. Vous vous rendez compte : une petite de 3 ans et demi qui connaît son credo et qui est capable d’aller jusqu’au bout pour affirmer : « Je crois à la résurrection de la chair, à la vie éternelle ». Quelle merveille ! Elle porte un jolie prénom cette fillette : « Victoire ». C’est toute une mission. Dès à présent, elle proclame donc le triomphe de la résurrection et de la vie.

 

Mercredi dernier, plusieurs enfants du patronage et du catéchisme se sont empressés de m’informer qu’à l’école, ils avaient pris une minute de silence suite au drame qui a eu lieu à Toulouse. Qu’ont-ils fait durant ces secondes qui se sont écoulées lentement ? Ils ont prié … je n’en doute pas ! Alors, pourquoi ne pas leur avoir dit tout simplement : « Recueillons-nous et prions pour les victimes du drame de Toulouse ». Une minute, il faut la remplir, ne croyez-vous pas ? … la remplir de compassion, certes … mais aussi en faire un temps de prière d’intercession, et surtout la charger d’espérance. Ce soir-là, je n’en doute pas, comme tous les autres soirs, la petite Victoire, chez elle, pensant particulièrement à ces enfants massacrés, a redis : « Je crois à la résurrection de la chair, à la vie éternelle ». Cette prière devait être tellement puissante sur le cœur de Dieu.

 

En ce dimanche, nous entendons la voix du Christ, impressionnante, qui s’élève : « Lazare, viens dehors ». Jésus dressé face au tombeau qui le défie, fait triompher la vie. Et le voilà qui nous affirme : « Celui qui croit en moi, même s’il meurt vivra ; et tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra jamais ». Le croyons-nous vraiment ? « Si le Christ est en vous, nous dit l’apôtre Paul, votre corps a beau être voué à la mort à cause du péché, l’Esprit est votre vie … celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous » (Rm 6,9). Encore une fois, le croyons-nous vraiment ?

 

La petite Victoire, à genoux chaque soir, en tout cas le proclame. Elle ne comprend sans doute pas la porté de chaque article de foi, mais à moi, … oui à moi, on ne fera pas croire que cette fillette ne comprend rien à rien, ni qu’elle ne perçoit aucunement que par-delà la mort, il y a la vie. À moi, on ne fera pas croire qu’elle ne sait pas que Jésus est son ami, qu’un jour il nous faudra mourir, mais que si vraiment nous croyons en lui, il nous ouvrira les portes du paradis.

 

Quant à nous, nous croyons que Jésus est notre ami, qu’il est la source et le Maître de la Vie. C’est bien de cette amitié dont nous voulons nous pénétrer de plus en plus et que nous voulons rayonner, spécialement au cours de nos Journées d’Amitié.

 

Père Gilles Morin

Curé