Œcuménisme de la charité ; œcuménisme des martyrs

L’homme est bien créé à l’image et à la ressemblance de Dieu. Par-delà l’étalage de son animalité, de ses errances et de ses frasques, il est des circonstances où ressurgit ce qu’il y a en lui de plus grand, de plus noble et de plus beau. Le drame qui a frappé Haïti donne lieu à un  élan de générosité  et de fraternité qui ne peut que susciter l’émerveillement. L’homme garde toujours sa capacité de se mobiliser avec ses frères et pour ses frères ; il sait laisser battre son cœur au rythme d’une belle solidarité. Voilà qui est un ferment d’unité pour notre humanité.

Les chrétiens sont bien appelés à ne faire qu’un seul corps, dans le Christ. C’est la volonté explicite de leur Seigneur et Sauveur. Par-delà les divisions qui ont marqué leur histoire et qui subsistent aujourd’hui encore au point de faire scandale, il est un œcuménisme puissant qui unit les disciples du Christ et qui se déploie dès que les épreuves et les drames fondent sur notre humanité : c’est l’œcuménisme de la charité. Les chrétiens ne peuvent faire fi des paroles de leur Maître : « Á ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13,35). Aujourd’hui,  en Haïti, les chrétiens, sur le terrain, ne font qu’un.

Il est un autre œcuménisme, le plus fort qui soit : celui des martyrs. Toutes les confessions chrétiennes ont la gloire d’avoir des martyrs : anglicans, orthodoxes, protestants, évangéliques, baptistes, toutes les branches catholiques : tous ont versé leur sang avec celui de Jésus. Rappelons-nous cette célébration extraordinaire près du Colisée, voulue par Jean-Paul II à l’occasion du grand jubilé de l’an 2000.  Á l’invitation des deux diacres, catholique et orthodoxe, tous s’étaient donnés la paix tandis que le chœur chantait « Ubi caritas ». Le symbole des Apôtres avait ensuite été proclamé en latin, en grec et en anglais. D’une seule voix, l’assemblée avait répondu : « Credimus, Domine. Amen » (Nous croyons, Seigneur). Les paroles du Pape Jean-Paul II avaient alors résonné et doivent nous rejoindre aujourd’hui encore à l’occasion de ce dimanche de prière pour l’unité.
« L’héritage précieux que ces témoins courageux nous ont laissé, disait-il,  est un patrimoine commun à toutes les Églises et à toutes les Communautés ecclésiales. C’est un héritage qui nous parle d’une voix plus forte que celle des fauteurs de division ». Et il poursuivait : « L’œcuménisme le plus convaincant est celui des martyrs et des témoins de la foi; il indique aux chrétiens du vingt et unième siècle la voie de l’unité. C’est l’héritage de la Croix vécu à la lumière de Pâques, héritage qui enrichit et soutient les chrétiens à mesure qu’ils avancent dans le nouveau millénaire. …/… ». Enfin, il invitait au devoir de mémoire : « Dans le siècle et dans le millénaire qui s’avance, puisse la mémoire de ces frères et de ces sœurs rester vivante! Mieux encore, puisse-t-elle grandir! Qu’elle soit transmise de génération en génération, afin d’être semence féconde d’un profond renouveau chrétien! Qu’elle soit gardée comme un trésor d’une insigne valeur pour les chrétiens du nouveau millénaire et qu’elle soit levain pour parvenir à la pleine communion de tous les disciples du Christ !

Père Gilles Morin
Curé