« J’étais aveugle, je vois ! »

 

Aux pharisiens incrédules, l’homme de l’évangile ne peut que proclamer sur tous les modes et tous les tons : « J’étais aveugle et maintenant, je vois ! ». Pouvoir contempler, admirer ; avoir des couleurs, des formes, des paysages et des visages plein les yeux, n’est-ce pas prodigieux ? Pour celui qui voit, la vie est transformée.

 

Cet homme connaît cependant une autre cécité : il est dans l’obscurité de l’ignorance et du péché. Le Christ le fait passer des ténèbres du monde à l’admirable lumière de Dieu. C’est une conversion intérieure, une véritable Pâques. « Maintenant, je vois ; je crois ; tu es le Fils de l’Homme ».

 

En ce temps de carême, il importe que nous interrogions loyalement Jésus : « Serions-nous des aveugles, nous aussi ? ». Certes, nous avons peut-être encore de bons yeux, mais qu’en est-il de notre regard intérieur ? Sommes-nous dans l’obscurité de notre monde ou dans la lumière de Dieu, celle de la grâce et de la sainteté ? « Il vaut mieux voir ses péchés que de voir toutes les merveilles de l’Univers », disait Saint Augustin. En ce domaine, quelle est notre acuité visuelle ? Si nous restreignons le champ de notre conscience au « je n’ai pas tué, je n’ai pas volé, je n’ai pas commis l’adultère », alors nous sommes aveugles.

 

Reconnaissons-le bien simplement : le péché obscurcit notre vie. Nous sommes un peu comme des aveugles tâtonnants et trébuchants. Le Christ nous invite à nous laver à la piscine des eaux vives de notre baptême, à ses flots de miséricorde déversés dans le sacrement de réconciliation. Si au terme du carême, ceux qui nous côtoient pouvaient s’étonner devant notre vie bouleversée : « C’est lui ; c’est bien lui ». Et nous de certifier : « C’est bien moi. Jésus m’a ouvert les yeux et j’ai vu ». Alors, on nous interrogera :

  • Qu’as-tu donc vu ?

  • J’ai vu mon péché ; et j’ai vu la miséricorde inouïe de Dieu. Oui, je me suis lavé et j’ai vu. Ma vie en a été transformée.

  • Tu as rêvé ; tu t’es illusionné.

  • Non, j’étais bien réveillé. Je suis sûr d’avoir vu, et j’en suis encore tout chamboulé. Je ne peux que chanter les miséricordes de Dieu.

 

Père Gilles Morin,

Curé