Une promesse, c’est sérieux !

 

Je la crois prête ; tel n’est pas son avis. Je ne le partage pas mais je le respecte. Pour moi, en effet, c’est une première. Dans mon ministère pastoral, il m’est arrivé parfois d’intervenir auprès de l’un ou l’autre jeune pour lui faire remarquer son incohérence (du moins apparente) à faire en toute vérité une profession solennelle de sa foi. Mais elle, cette jeune adolescente si régulière et si fervente,.. quelle surprise ! Sa décision ne peut être le reflet d’une démotivation chrétienne ou d’une tiédeur. C’est tout le contraire. Son aveu s’est fait les larmes aux yeux. Pour elle, promettre à Dieu de l’aimer plus que tout et de le suivre sans retour, c’est tellement grand, beau et sacré qu’on ne saurait s’y engager à la légère. Elle a réfléchi ; elle a mesuré les exigences d’un tel engagement. Elle ne se sent pas suffisamment prête ; elle préfère donc s’y préparer davantage pour vivre cet événement plus saintement.

 

Il nous arrive tant de fois de parler trop vite, de faire des promesses sans lendemain, de prononcer des paroles avec assurance tout en sous-estimant leur sens. Considérons ce qui nous est relaté dans l’Evangile de ce dimanche : une question est posée : « Vous, que dites-vous ? Pour vous qui suis-je ? » Pour tout catholique, la réponse paraît aujourd’hui  quasi-évidente : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ». Mais celui qui laisse jaillir de ses lèvres de tels mots doit bien mesurer les conséquences d’une telle profession de foi. Jésus est on ne peut plus clair : « Tu crois en moi, alors suis-moi,… Mais attention,  celui qui veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour, et qu’il me suive ». C’est une manière de nous dire : « Si tu n’es pas prêt à me suivre jusque là, ne va pas proclamer de solennels « Je crois ». Comment pourrais-tu dire en toute vérité « Je crois » si tu n’es pas disposé à m’aimer jusque là ? »

 

L’apôtre Pierre a fait cette douloureuse expérience au soir de la Cène. De manière péremptoire et avec véhémence, il s’est insurgé contre Jésus : « Même si tous t’abandonnent, moi, jamais, je suis près à aller en prison et à la mort pour toi ». Nous connaissons la suite. Le lâche au triple reniement se reprendra, allant jusqu’à verser son sang pour son Seigneur et Maître, pour son ami et son intime.

 

Au cours de la messe de 11h15, ce dimanche, les jeunes qui font leur profession de foi chanteront de leur plus belle voix : « Devant tous je m’engage sur mon honneur et je te fais hommage de moi, Seigneur ». Ils ajouteront : « Je jure de te suivre en fier chrétien et tout entier je livre mon cœur au tien ». Puis ils s’écrieront : « Je veux t’aimer sans cesse de plus en plus ; Protège ma promesse, Seigneur Jésus ! ». Il s’agira bien, pour eux, de s’engager et de promettre. Puissent-ils ne pas prononcer ces mots à la légère. Toute l’assemblée sera ensuite invitée à reprendre d’une seule voix ce beau chant qui a marqué notre jeunesse. En cette année de la Foi, puissions-nous le chanter en vérité et raviver notre promesse.

 

Père Gilles Morin

Curé

 

Le prêtre au cœur qui s’immole et qui aime

 

Il est breton ; je le suis. Il est né en 1955 ; moi de même. Il est d’une famille de 7 enfants ; moi également. Il est Religieux de Saint Vincent-de-Paul ; je suis aussi membre de cette Congrégation que lui et moi aimons tant et à laquelle nous avons voué notre vie. Il est prêtre dans cet Institut ; il l’est au même titre que moi. Aujourd’hui, il jubile ; avec lui, nous rendons grâce à Dieu pour ses 25 ans de sacerdoce.

 

Que de différences pourtant entre lui et moi. Une paroissienne me rapportait un jour que le Père Emmanuel lui avait lâché ces quelques mots : « Le Père Morin, il est si brillant » (à voir). Je lui avais répondu spontanément : « On peut être brillant et se damner ; l’important c’est d’avoir le cœur brulant et d’aimer … c’est de s’immoler et de prier ». D’une harpe à 100 cordes peut sortir une affreuse cacophonie ; d’une autre à 10 cordes peut s’élever une merveilleuse mélodie. Un prêtre ne doit jamais chercher à briller aux yeux des hommes en étalant ses talents. Il est là comme un  » autre Christ  » pour servir et donner sa vie. L’enjeu est de taille. « Des prêtres, disait Saint Vincent-de-Paul, dépend le bonheur du Christianisme ; car si les bons paroissiens voient un bon prêtre, un charitable pasteur, ils l’honorent et suivent sa voie, ils tâchent de l’imiter ». Le Père Jean-Léon Le Prevost, fondateur de notre congrégation, a souligné la note spécifique qui devrait caractériser le Prêtre Religieux de Saint Vincent-de -Paul : « Qu’il soit attentif aux besoins des pauvres, qu’il ait l’intelligence de leurs peines, la compassion pour leur misère, qu’il en pénètre les causes, qu’il tâche d’y porter remède, qu’il soit homme de charité en un mot ».

 

Et le Père Emmanuel est « homme de charité ». Depuis 25 ans, il se donne aux pauvres avec tout son cœur. Il a le zèle des âmes et un grand souci de les voir en amitié avec le Seigneur. Ce n’est là que fidélité à ce qu’il écrivait à son Supérieur en date du  16 avril 1988, dans la lettre par laquelle il demandait à devenir prêtre : « N’est-ce pas « la meilleure part« , comme nous le rappelle le Père Le Prevost, que de se porter de préférence vers les plus petits et les plus faibles« . Et il me sera possible par l’ordination sacerdotale de leur transmettre la vie surabondante qui jaillit du Cœur transpercé du Christ. Que la vie et la vérité, que Jésus donne à profusion, libère ainsi de nombreuses âmes des liens du péché et de l’ignorance ! ».

 

Lorsque nous étions au séminaire, le Père Emmanuel et moi, nous aimions nous détendre en faisant du cross. Nous courions bien à l’époque. Nous allions bon train. Nous avions des jambes et du souffle. Si le corps n’a plus la même vigueur ni la même endurance, le cœur de notre jubilaire continue de battre au diapason du Cœur du Christ et de celui de la Vierge Marie… un cœur qui aime, qui s’immole et qui se donne. C’est beau ! Voilà le cœur d’un prêtre. Il faut vraiment en rendre grâce.

 

Père Gilles Morin

Curé