La famille : une étoile à suivre

 

J’ai eu récemment à prendre le métro. De station en station, une même affiche attirait mon regard. C’était une publicité pour un site de rencontres dont le gros titre visait à faire choc : « L’amour ne tombe pas du ciel ». Spontanément, je ne pouvais m’empêcher de m’interroger : « De quel amour parle-t-on ? » Et, de station en station, de me redire intérieurement : « Mais si ; l’Amour tombe du ciel ».

 

L’Amour est bel et bien inscrit dans le ciel. Les mages l’ont confusément pressenti en admirant l’étoile, au point de se mettre en marche pour la suivre et d’aller jusqu’au bout de l’aventure. Coûte que coûte, ils voulaient trouver le Roi qui venait de naître et qui n’était autre que l’Amour incarné. Ils ont cherché ; ils ont trouvé ; et « ils éprouvèrent une très grande joie » précise l’Evangile. Le superlatif dit l’ampleur de leur allégresse.

 

Incroyable ! « Le Verbe s’est fait chair », l’Amour est venu jusqu’à nous pour nous dire ce qu’est véritablement l’amour. Je ne nie aucunement que bien des circonstances dans notre vie puissent éveiller en nos cœurs des sentiments parfois brûlants, à même de nous rendre éperdument amoureux. Je connais des couples qui se sont rencontrés par le biais de sites internet et se sont ensuite unis par le sacrement du mariage. Ils lisent toutefois leur histoire à la lumière de la Providence qui les a conduits l’un vers l’autre pour s’aimer comme Dieu les aime. Pour eux, leur amour vient bien du ciel.

 

Réduire l’amour à nos seuls horizons humains, c’est se condamner à n’avancer dans la vie qu’à la mesure de nos cœurs, non à celle du cœur de Dieu. C’est entrer dans la spirale des émotions, passions et pulsions incapables de combler nos attentes les plus profondes, quelle qu’en soit l’intensité. C’est s’exposer à situer les relations amoureuses sur le plan de choix humains dépourvus de toute verticalité et sacralité. Dans une telle logique, l’amour est ravalé au rang de la fabrique … tout comme les enfants sont réduits à des amas de cellules et à des objets en voie de commercialisation. L’actualité nous montre combien cette spirale est enclenchée.

 

L’Amour vient bien du Ciel. « Dieu EST Amour ». L’homme et la femme qui s’unissent pour fonder une famille se reçoivent l’un et l’autre de Dieu. C’est toujours Dieu qui leur donne de donner la vie. Les enfants qui naissent de leur union sont normalement le fruit de leur amour. Ne pas le reconnaître, c’est ignorer l’étoile, ne plus être fascinés par elle,  et se condamner à errer sur des chemins qui ne sauraient faire éprouver « une très grande joie ».

 

Les familles rayonnantes sont autant d’étoiles qui scintillent dans notre monde trop souvent enténébré. Elles sont le reflet le plus tangible de l’être même de Dieu, à savoir de véritables trinité d’amour. Regardez-les ; côtoyez-les ; suivez-les … et elles vous mèneront à Jésus. Mais les « Hérode » d’aujourd’hui ne veulent pas de Sauveur. Ils s’en prennent donc à l’étoile − à la famille − pour que Jésus ne soit ni connu, ni trouvé, ni aimé.

 

Dimanche prochain, je marcherai donc pour proclamer à ma manière : « Ne portez pas atteinte à la famille ; ne voilez pas l’étoile ; ne privez pas les générations à venir de pouvoir éprouver une très grande joie ».

 

Père Gilles Morin

Curé

Que dirait-il aujourd’hui ?

 

Oui, que dirait aujourd’hui le Père Jean-Léon Le Prevost, lui qui en 1869 écrivait à l’un de nos premiers frères : « Les temps sont mauvais …/… La famille, ce premier et si admirable moyen de la Providence pour façonner les âmes, est presque détruite, chrétiennement parlant … le Gouvernement, qui tend, per fas et nefas, à s’emparer des âmes, les égare et les pervertit, et l’Eglise suffit à peine, dans ses moyens ordinaires, aux besoins des fidèles qui savent encore le chemin de la paroisse. Ce qui reste en dehors d’elle est immense … Les besoins à satisfaire étant immenses, nous les avons pris hardiment dans toute leur étendue ; nous avons embrassé tous les âges, depuis l’enfant jusqu’au vieillard ; nous suivons le pauvre et l’ouvrier dans son éducation, dans son travail, dans ses nécessités spirituelles et temporelles et jusqu’en ses délassements ; nous nous sommes faits pauvres pour eux, nous avons partagé notre demeure avec eux et nous vivons comme eux ».

 

Vous avez en ce passage de notre fondateur la quintessence de notre mission de Religieux de saint Vincent-de-Paul. Cette flamme qui embrasait le cœur du Père Le Prevost, nous voulons la porter de générations en générations, tout spécialement aux pauvres, aux jeunes, et aux familles … oui, aux familles à qui je tiens à redire en ce dimanche la place privilégiée qu’elles tiennent dans notre apostolat. « La famille, écrivait encore Jean-Léon Le Prevost, est bien l’œuvre divine par excellence ». Or, nous le savons, cette institution, cellule de base de la société, est aujourd’hui malmenée, déstabilisée, et tellement agressée. Dieu en Jésus-Christ est venu à nous dans une famille. En s’en prenant à la famille, ne nous y trompons pas, on s’en prend à Dieu. En s’en prenant à Dieu, on s’en prend toujours, au bout du compte, à l’homme. Comment alors espérer un monde plus juste et plus fraternel, une terre pour l’homme où sont respectés les droits fondamentaux de tout homme ?

 

Notre Pape Benoît XVI, dans son homélie de la nuit de Noël, vient de rappeler que « la paix sur la terre entre les hommes est en relation avec la gloire de Dieu au plus haut des cieux. Là où on ne rend pas gloire à Dieu, là où Dieu est oublié ou même renié, il n’y pas non plus de paix. » Or n’est-ce pas oublier Dieu voire le renier que de chercher à défigurer la famille ? Comment alors espérer la paix pour le plus grand bien de l’homme ?

 

Les temps sont mauvais aujourd’hui, sans nul doute, mais ce sont les temps que Jésus nous donne pour porter Sa lumière et Sa vérité sur Dieu et sur l’homme, et donc sur la famille. Comme j’ai déjà eu à le dire, l’enjeu de la famille est fondamental pour notre société. Nous avons prié, nous avons jeûné, nous avons marché. Et nous continuerons de le faire. Mais il est aussi une prédication incontournable et particulièrement éloquente : c’est le témoignage de familles heureuses, véritablement trinités d’amour, profondément unies et débordantes de joie. Nous en avons tant besoin.

« Famille, que dis-tu de toi-même ? », lançait en son temps le bienheureux Jean-Paul II. Et ce grand pape d’apporter lui-même cette réponse : « Je suis parce que Celui qui dit de lui-même « JE  SUIS  CELUI  QUI  SUIS », Celui-ci m’a donné le droit et la force d’être. Famille je suis. Je suis le lieu de l’amour, je suis le lieu de la vie, je suis. Que dis-tu de toi-même ? Je suis la joie et l’espérance ».

 

Père Gilles Morin
Curé