L’or véritable

Sans lui, je ne serais ni Religieux de Saint-Vincent-de-Paul ni aujourd’hui au milieu de vous. Ma famille et moi-même lui devons tant. C’est en son nom que des personnes distinguées sont venues nous visiter. Nous étions des « Lazare », des pauvres sans le nécessaire ; et les membres des Conférences Saint Vincent-de-Paul nous ont regardés, rassasiés et aimés. Sous l’impulsion de ce géant de la charité que fut Monsieur Vincent, ces riches nous ont en quelque sorte sauvés.

 

Parmi les actions menées par ces confrères, il y avait chaque année ce moment tant attendu : celui de l’arbre de Noël, après-midi de fête, situé quelques jours après la Nativité. Nous étions choyés ; un bon goûter nous était servi et des cadeaux nous étaient remis. Cette année-là, -je devais avoir environ 8 ans -, il y eu la projection d’un film qu’aujourd’hui encore je garde en mémoire. Quelle merveille à mes yeux d’enfant.  C’était un dessin animé inspiré d’un conte indien. L’histoire était celle d’un mahârâja avide essayant de s’emparer d’une antilope magique dont les sabots distribuaient des pièces en or. Pour arriver à ses fins il fit capturer son ami, un petit garçon, exerçant ainsi un chantage contre cette antilope : de l’or contre la vie de son jeune ami. L’animal n’eut aucune hésitation. À coups de sabots répétés, il projeta sur le mahârâja de l’or et encore de l’or … jusqu’au moment où ce seigneur avide fut submergé au point d’étouffer et de s’écrier : « Assez, assez ! ». C’est alors que l’or se transforma en argile et que le Rajah mourut. La dernière image de ce beau film qui porte le nom de « L’antilope d’or«  nous présentait l’animal magique et l’enfant s’en retournant, libres, … et amis. Là était leur bien le plus précieux.

 

Ces confrères de Saint Vincent-de-Paul qui visitaient alors régulièrement ma famille n’arrivaient certes pas les mains vides. Sans magie, ils apportaient des vivres … mais toujours ils venaient en amis. Là était le trésor à nos yeux. Le nom de Saint Vincent-de-Paul était  prononcé, mais plus encore celui de Jésus. Le Christ ! voilà le bien infini, le seul trésor capable de combler notre cœur. On ne saurait ni mettre la main sur Lui ni s’emparer de Lui. Il veut être notre Seigneur et Maître, certes, mais aussi notre ami : « Je ne vous appelle plus serviteurs … je vous appelle mes amis … ce que je vous commande c’est de vous aimer les uns les autres. » (Jn 15,15-17)

 

Dans le film que je viens d’évoquer, la finale nous présente l’or de l’avidité changé en argile. Avec le Christ, le message est inverse et on ne peut plus clair. Tout ce que tu donnes avec une charité véritable se transforme en or … déjà ici-bas dans ton cœur, mais plus encore dans le Royaume des Cieux. Alors n’hésite pas ! Donnes.

 

Père Gilles Morin,

Curé

Non pas malhonnêteté mais habileté

« Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent ». Ces paroles du Christ sont des plus claires. « Aucun domestique ne peut servir deux maîtres, affirme Jésus : ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il s’attachera à l’un et méprisera l’autre ». Or nous sommes tous des domestiques, y compris les gouvernants et les puissants de ce monde. Tous, absolument tous, nous appartenons au Seigneur qui nous a créés et rachetés. L’expérience nous montre, hélas, trop souvent, que l’argent devient roi ! « Mammon » semble s’imposer tandis que Dieu est évacué et expulsé. C’est pourquoi l’apôtre Paul nous encourage à prier « pour tous les hommes, pour les chefs d’état et tous ceux qui exercent l’autorité ». Il est si difficile de ne pas se laisser piéger par « Mammon », de ne pas glisser dans la malhonnêteté jusqu’à parfois escroquer voire écraser.

 

Que de fois la Parole de Dieu nous alerte ! que de fois elle nous invite à être sur nos gardes !

« Celui qui aime l’argent, affirme Ben Sirac le sage, n’échappe guère au péché, celui qui poursuit le gain se laisse fourvoyer. Beaucoup ont été victimes de l’or, leur ruine était inévitable» (Si 31, 5-6).

Quant à l’apôtre Paul, il n’hésite pas à dire que « la racine de tous les maux, c’est l’amour de l’argent. Pour s’y être livrés, certains se sont égarés loin de la foi et se sont transpercé l’âme de tourments sans nombre »  (1Tm 6,10).

 

Les saints et saintes de Dieu, eux-aussi, nous prêchent par leurs paroles et leur exemple.

Sainte Teresa de Calcutta qui vient d’être canonisée ne disait-elle pas à ses religieuses : « Quand on entre en contact avec l’argent, on perd le contact avec Dieu. Que Dieu nous en préserve. Mieux vaut la mort ! »

Nous nous souvenons aussi de la petite Bernadette Soubirous, de Lourdes, serrant dans ses bras sa sœur cadette Toinette en lui répétant : « Ne vous enrichissez pas ! Surtout, ne vous enrichissez pas ! »

 

Il y a donc bien un danger. Attention à ne pas nous égarer ni nous laisser enchaîner. « Mammon » rôde, tel un lion prêt à se jeter sur sa proie. Ne le laissons pas nous dévorer. Ne nous y trompons pas. Dans l’Evangile de ce dimanche, Jésus ne fait aucunement l’éloge de la malhonnêteté mais bien celui de l’habileté. Que notre argent et nos biens soient nos serviteurs et non nos dictateurs ! Qu’ils nous permettent d’ouvrir largement nos mains et notre cœur pour que, le jour où ils ne seront plus là – et ce  jour viendra-, des amis nous accueillent dans les demeures éternelles.

 

Père Gilles Morin,

Curé