Devoir de mémoire

 

Depuis dimanche dernier, Grégoire de Narek est devenu le 36ème docteur de l’Eglise. Notre pape François en a ainsi décidé. Cette proclamation se situe dans le contexte du centenaire du génocide arménien. Cette page d’histoire qui remonte à un siècle est le drame de tout un peuple que l’humanité ne saurait oublier. Le 3 juin 2013, notre Saint-Père François avait qualifié ce drame de « premier génocide du XXe siècle ». Dans la lettre qu’il vient d’adresser à nos frères et sœurs Arméniens, il écrit : « Un siècle s’est écoulé depuis l’horrible massacre qui fut un véritable martyre de votre peuple, dans lequel beaucoup d’innocents sont morts en confesseurs et martyrs pour le nom du Christ …/… ce fut vraiment le « Metz Yeghern », le  « Grand Mal », comme vous avez appelé cette tragédie ».


On pourrait être tenté de relativiser ce passé, de le considérer comme de l’histoire ancienne, en des temps révolus… Mais les pages d’histoire sanglante qui s’écrivent aujourd’hui en de multiples régions du globe prouvent qu’il n’en est rien. « Faire mémoire de tout ce qui est arrivé, dit encore notre Pape, est un devoir, non seulement pour le peuple arménien et pour l’Église universelle, mais aussi pour toute la famille humaine, afin que l’avertissement qui vient de cette tragédie nous évite de retomber dans des horreurs semblables qui offensent Dieu et la dignité humaine ». Le Pape François nous invite donc à nous unir spirituellement à la cérémonie de canonisation des 1,5 million de victimes du génocide de 1915 qui aura lieu jeudi prochain 23 avril, en la cathédrale de l’église arménienne d’Etchmiadzin. Saint Grégoire de Narek y sera bien évidemment invoqué et prié. C’était un moine arménien du Xème siècle. Ce grand mystique,  a affirmé le Pape, « a su exprimer plus que tout autre la sensibilité de son peuple, donnant une voix au cri, qui devient prière »… Au plus fort de l’épreuve, il criait ainsi sa confiance en Dieu: « Dans l’attente certaine de sa puissance, je crois avec une indubitable espérance, me confiant dans la main du Tout Puissant… que je le verrai, Lui en personne, grâce à sa miséricorde et à sa pitié, et que j’hériterai du Ciel ».

 

En ce dimanche, providentiellement, le psalmiste nous invite à vibrer avec nos frères arméniens : « Quand je crie, réponds-moi » (Ps 4,1) supplie-t-il. Ils sont nombreux ceux qui crient vers Dieu aujourd’hui. Et ce même psalmiste de poursuivre : « Dans la paix moi aussi, je me couche et je dors, car tu me donnes d’habiter, Seigneur, seul, dans la confiance ». Puissent-ils être nombreux ceux qui, accueillant la paix du Ressuscité, trouvent le repos dans la confiance. Crions avec eux ; que notre cri devienne prière ! Crions pour eux et crions aussi pour nous lorsque nous sommes au creux de l’épreuve … mais toujours, que notre cri soit prière.

 

Père Gilles Morin, curé