Sous le regard de Jésus et de Marie

Vous le savez sans doute, par-delà leur dimension ludique et sportive, nos patronages sont des lieux de mission et d’évangélisation. « Au patro, on joue et on prie ».

Durant la colonie de vacances en juillet, chaque journée se terminait par la prière à la chapelle. Les enfants regagnaient ensuite leur chambre pour se coucher. Le maintien d’un climat de calme était demandé mais pas toujours respecté. Puis, lorsque les lumières étaient éteintes, je passais dans les chambres pour bénir personnellement chaque enfant. J’aimais ce moment privilégié où, traçant le signe de la croix sur chaque front, je prononçais ces simples mots : « Que Dieu te bénisse et que la Vierge Marie veille bien sur toi. Bonne nuit ». Ce soir-là, vers les derniers jours de la colonie, je m’apprêtais à entrer dans la chambre de deux jeunes de 13 ans lorsque j’aperçu, sous la porte, un rayon de lumière. Ces coquins ne devaient-ils pas normalement être couchés, dans l’obscurité ? Tout en franchissant le seuil avec l’intention de les gronder, je ne pus que m’émerveiller. Couchés, ils l’étaient bel et bien ; dans une quasi obscurité, ils l’étaient aussi. La seule lumière était celle d’une lampe électrique dont le faisceau était braqué sur une image de Jésus posée sur la table de nuit qui séparait leurs lits. Le regard du Christ était d’une grande douceur, reflétant la miséricorde de Dieu. Il y avait également un chapelet, bien en évidence, signe de la présence de la Vierge Marie. L’un de ces deux jeunes était chrétien ; l’autre était musulman. Ce soir-là et les suivants, ils s’endormirent donc sous le regard plein de tendresse de Jésus-Sauveur et la vigilance maternelle de leur Mère du Ciel. Cette initiative venait-elle du chrétien ou du musulman (pourquoi pas ?) je ne saurais le dire. Dans tous les cas, « c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux« .

Vous le savez sans doute, ce dimanche 16 octobre, le pape célèbre à Rome la canonisation de sept nouveaux saints. Parmi eux, deux français. Pour nous quelle fierté ! quelle grâce !

Tout d’abord, la bienheureuse Elisabeth de la Trinité, morte le 9 novembre 1906 à l’âge de 26 ans au carmel de Dijon. « Oh ! vois-tu, écrivait-elle à son amie Françoise, j’ai une compassion profonde pour les âmes qui ne vivent pas plus haut que la terre et ses banalités ; je pense qu’elles sont esclaves et je voudrais leur dire : Secouez ce joug qui pèse sur vous ; que faites-vous avec ces liens qui vous enchaînent à vous-même et à des choses moindres que vous-même ? »  Et de lui prodiguer ce sage conseil : « Il faut que tu te bâtisses comme moi une cellule au-dedans de ton âme ; tu penseras que le bon Dieu est là, et tu y entreras de temps en temps … »

Le second est le Frère Salomon Leclercq, Frère des Ecoles Chrétiennes, martyrisé le 2 septembre 1792 au couvent des carmes avec 190 autres ecclésiastiques. « Le chrétien qui a de la foi, écrivait-il à sa sœur, doit regarder toutes les choses d’ici-bas, richesses, plaisirs, bonne chère comme de pures vanités, propres à amuser des hommes de chair et de sang et incapables de contenter une âme qui sait qu’elle est faite pour jouir de Dieu et pour en jouir éternellement ».

Deux saints qui nous ramènent à notre vocation, donc à la mission. Nous sommes faits par Dieu et pour Dieu. Nous sommes faits pour vivre sous le regard de Dieu et dans l’amour de Dieu, nous-mêmes mais aussi tous nos frères. Nous sommes faits pour nous endormir avec Jésus et Marie, plongés dans un océan de miséricorde, pour les contempler éternellement dans la gloire.

Père Gilles Morin, curé