De la hauteur, de la blancheur

 

« Pourtant, que la montagne est belle ! » chantait en son temps Jean Ferrat. Je reviens d’une semaine passée avec les jeunes du patronage sur les pistes du Lioran, en Auvergne. Si, du fait de mes infirmités, je n’ai pas eu à chausser les skis, j’ai cependant pu admirer les sommets enneigés, éblouissants sous un soleil qui ne nous a pas fait défaut. Oui, que la montagne est belle ! Plusieurs parmi les jeunes ont même pu contempler, depuis l’une des cimes, une mer de nuages. Pour eux, c’était une découverte, un spectacle inouï qu’ils ne sont pas près d’oublier. Que c’est beau la hauteur ! Que c’est beau la blancheur !

 

« En ce temps-là, nous dit l’Evangile ─ il y a donc bien longtemps ─ Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmena, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne »… Et le texte ajoute : « Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une telle blancheur ». Là encore, de la hauteur et de la blancheur … un spectacle tel que les sommets enneigés du Lioran ne sauraient rivaliser.

 

Nous savons que le Christ va passer d’un sommet à l’autre, du Thabor au Golgotha. C’est là qu’il sera élevé, sur une croix. En ce lieu, pas de blancheur, mais le rouge du sang versé ; plus d’apôtres à se complaire dans la contemplation ; plus personne pour dire : « il est bon que nous soyons ici ». Non ! Sur la colline dite « du crâne », le Nazaréen est traité comme « rebut de l’humanité », « celui devant qui on se voile la face ».

 

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le », nous redit en ce dimanche la voix du Père. Alors écoutons Jésus qui, du haut du Thabor, nous avertit : « Viens ! Prends de l’altitude ; admire la hauteur ; contemple la blancheur. Mais viens avec moi jusqu’au bout. Suis-moi jusqu’au Golgotha ! Ne te défile pas devant les combats ; ne te détourne pas de la croix ; ne redoute pas la rougeur du sang versé. Sois-en sûr : si tu restes avec moi, je t’élèverai au plus haut des cieux et tu resplendiras de gloire ».

 

Abraham, notre père dans la foi, n’a pas hésité à gravir le mont Moriah pour y offrir le sacrifice de son propre fils. À son exemple, sommes-nous prêts à prendre de la hauteur pour nous extraire de nos plats horizons quotidiens ? Il le faut si nous voulons pouvoir sacrifier et immoler tout ce qui, en nous, fait écran à la lumière du Christ, nous détourne de Lui et rivalise avec Lui. On ne gravit pas les sommets sans efforts, sans sueur, sans laisser au moins un peu de notre sang. On dépasse alors les nuages ; on est dans les hauteurs ; on découvre la blancheur et la lumière. Quel spectacle ! Imaginez ce que ce sera lorsque nous serons dans la gloire … si nous sommes fidèles jusqu’au bout, avec la grâce de Dieu.

 

Père Gilles Morin,

Curé