Du désert au Thabor

Comment  et où vivre ce temps privilégié durant lequel nous marchons vers Pâques ? Au désert, bien sûr, – comme nous y invitait la liturgie de dimanche dernier – en menant une lutte acharnée contre Satan ; mais aussi au Thabor, comme nous y entraîne Jésus en ce jour. Avec Pierre, Jacques et Jean, – qui seront aussi les témoins de son agonie à Gethsémani – le Christ nous appelle à gravir  cette montagne, la plus haute de Galilée, pour le contempler, Lui, le transfiguré.

Saint François de Sales, patron secondaire de notre Congrégation des Religieux de Saint Vincent-de-Paul, fit cette confidence à l’un de ses amis ; c’était en 1607 : « Je passerai ce Carême à faire résidence en ma cathédrale et à rhabiller un peu mon âme qui est presque décousue par tant de tracas … C’est une horloge détraquée ; il faut la démonter pièce à pièce et, après l’avoir nettoyée et huilée, la remonter pour la faire sonner juste ». Alors, nous aussi, passons ce Carême 2017 en la cathédrale de notre cœur qui est à la fois terre de désert et de combat mais aussi lieu de contemplation et de transfiguration. Nous avons grand besoin de « rhabiller un peu notre âme ». N’est-elle pas « décousue par tant de tracas » ? Satan ne l’a-t-elle pas détraquée ? C’est en présence du Seigneur que nous pourrons voir apparaître, avec humilité et vérité, les multiples zones d’obscurité qui empêchent la grâce de nous irradier. C’est sous le regard du Sauveur que nous pourrons discerner l’ampleur de la casse et nous reconnaître pécheur. Laissons-le donc nous démonter pièce à pièce pour nous nettoyer et tout huiler. Laissons-le ensuite nous remonter pour que nous sonnions juste. C’est Lui et Lui seul qui peut accomplir en nous cette œuvre de « recréation » et de « rédemption ». Le péché nous a défigurés ; Jésus veut et peut nous transfigurer.

Chaque fois que nous entrons véritablement au plus intime de notre cœur, – ce que nous faisons trop peu souvent -, nous y trouvons le Christ en sa Passion et en sa Gloire, Lui le Crucifié, le ressuscité, le transfiguré, le glorifié.

Chaque fois que nous pénétrons dans notre église, nous sommes en quelque sorte à gravir les pentes du Mont Thabor. Nous pouvons avouer : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ». Dès que nous levons un peu les yeux, que voyons-nous ? : La lumière traverse la croix et ainsi la révèle. Ce simple regard nous rappelle qu’il ne saurait y avoir de Gloire sans Croix ni de Résurrection sans Passion.  « Tout finit et tout commence en Jésus, dans sa Passion et dans sa Gloire », enseigne le Pape François dont nous allons fêter ce lundi le 4ème anniversaire de son élection au Pontificat.

Alors, avançons toujours plus avant dans l’accueil de la grâce de Dieu pour qu’elle transfigure tout notre être et qu’ainsi la vraie lumière intérieure irradie notre regard et notre visage. En présence et sous l’action du Christ Sauveur, puissions-nous être en vérité des êtres sauvés et des transfigurés, des « enfants de lumière ».

Père Gilles Morin, curé