Immédiateté

Le Seigneur appela : une fois, deux fois, trois fois. À chaque appel, le jeune Samuel se leva et dit : « Tu m’as appelé, me voici ». Nous connaissons bien ce texte. Traversons les siècles et essayons de le transposer à notre époque.

Il est probable que, comme moi, vous avez déjà fait cette expérience désagréable et quelque peu irritante : Vous vous trouvez en réunion ou en entretien personnel ; vous êtes en train d’échanger sur un sujet important … et voilà qu’un portable sonne, bipe ou vibre. Instantanément, votre interlocuteur s’empare de son téléphone pour regarder ou écouter ce qui, à ses yeux, ne saurait attendre. Il veut être réactif promptement, tapoter sur son écran prestement, répondre immédiatement. Vous sentez, quant à vous, que vous êtes face à quelqu’un qui ne vous écoute plus vraiment.

Les prouesses des nouvelles technologies nous rendent joignables à tout moment  et nous permettent de répondre instantanément. Si l’événement relaté dans la première lecture de ce dimanche avait lieu de nos jours, le petit Samuel-type s’empresserait de répondre « Allo ! » ou encore, prenant connaissance d’un texto, activerait ses doigts pour répondre au plus tôt. Mais vous le savez sans doute, parmi les diverses fonctions de nos portables, il nous est possible de choisir celle qui nous permet de bloquer certains correspondants ou de les faire passer en indésirables.

On imagine donc volontiers le jeune Samuel-type, dans un premier temps en mode « sonnerie », être réveillé, courir vers le prêtre Éli pour finalement s’entendre dire : « Je n’ai pas appelé, retourne te coucher ». Notre jeune rejoint donc son lit tout en faisant le choix de passer en mode « vibreur ». Mais même avec une telle fonction, le bruit opéré par les vibrations a de quoi vous réveiller. Une seconde fois, Samuel est donc debout, va trouver Éli qui lui dit : « Je n’ai pas appelé, retourne te coucher ». C’en est trop. Ce jeune regagne sa chambre, active le mode « silence », et s’endort profondément. C’en est fini ; personne ne le dérangera plus.

Le Samuel qui nous est présenté dans la Bible, lui, reste à tout moment connecté, joignable, en mode sonnerie, pour ne rater aucun appel du prêtre Éli. Qu’en est-il de nous, de notre permanence et de notre promptitude à répondre aux appels du Seigneur ? Sommes-nous joignables par Lui à tout moment ? Pour Lui, sommes-nous toujours en mode « sonnerie », au pire en mode « vibreur », jamais en mode « silence » ? Certains de nos contemporains vont jusqu’à l’exclure de leurs contacts. Dieu est-il au contraire pour chacun d’entre nous « le grand désirable » ?  Pas question alors de rater un seul de ses appels.

Père Gilles Morin, curé