Une paroisse, pas une agence matrimoniale

Notre église en avait bien besoin. Il y a quelques jours, comme vous avez pu le constater, un grand ménage de son sol a été effectué. Envoyée par l’entreprise de nettoyage qui assure durant l’année son entretien ordinaire, une équipe de 4 jeunes s’est présentée au jour dit pour se mettre au travail. Après quelques mots de présentation et d’explication à propos des lieux, le responsable m’a interrogé :

  • C’est l’église catholique, ici ?

Dans la foulée de ma réponse affirmative et à mon grand étonnement, il m’a alors posé une demande tout à fait inattendue :

  • Est-ce que vous pouvez me trouver une femme, une fille catholique ?

J’aurais pu réagir et répliquer tout de go : « Ici, c’est effectivement l’Eglise catholique ; c’est une paroisse, ce n’est pas une agence matrimoniale ». Sa demande a pourtant suscité en moi une action de grâce. Pourquoi ?

Ce jeune homme était Malien. Connaissant un peu l’Afrique de l’Ouest et sachant que le Mali est un pays où les habitants sont, à 90%, musulmans, j’ai, à mon tour, interrogé ce grand jeune sympathique qui me décochait de larges sourires.

  • Et toi, tu es musulman ?

Après un petit temps d’hésitation et de silence, il me répond :

  • Je suis en recherche … je me rapproche des chrétiens.

J’ai bien senti que son désir de trouver une jeune fille catholique avec laquelle il pourrait se marier s’enracinait dans le fait qu’à ses yeux, les jeunes filles catholiques jouissaient d’une bonne réputation et qu’elles étaient gage de sérieux pour le rapprocher de Dieu. D’où mon action de grâce.

Vous voyez, mesdemoiselles, vous voyez mesdames, comme chrétiennes catholiques, vous avez bonne réputation. Il vous faut donc la préserver et la mériter.

Que ferait ce jeune homme d’une telle jeune fille ? Je ne saurais le dire. Mais en ce jour où nous fêtons ici, à Notre-Dame de Nazareth, les jubilaires de mariage, gravons en notre cœur ces mots que l’apôtre Paul adresse aux chrétiens de Corinthe : « Soyez attachés au Seigneur sans partage ». Le but ultime du sacrement du mariage est bien, non pas d’abord de s’unir l’un à l’autre à coup d’émotions et de pulsions mais, allant puiser à la source, d’accueillir les flots d’amour qui jaillissent du cœur de Dieu pour les répandre en celui ou en celle que le Seigneur nous donne comme époux ou comme épouse. Alors, et alors seulement, il est possible de s’aimer comme Dieu nous aime, et de cheminer ici-bas l’un avec l’autre et l’un par l’autre vers le Royaume éternel de la plénitude de l’Amour.

Vous l’avez sans doute deviné : J’ai laissé ce jeune Malien si sympathique sur sa faim. Je n’ai pas de jeune paroissienne à lui proposer, tout simplement parce que je n’ai nulle mission ni lumière particulière pour susciter des rendez-vous  » amoureux « , si sérieux fussent-ils. Notre histoire personnelle est entre les mains de Dieu. Si nos jubilaires de ce jour témoignaient des circonstances de leur rencontre première, nous aurions certainement une grande diversité de récits et de belles surprises. Dieu est Dieu ; il est la source de l’Amour. Je ne peux donc que prier bien sincèrement pour ce jeune auquel je souhaite de tout cœur qu’il rencontre un jour une jeune fille qui l’attache au Seigneur sans partage.

Père Gilles Morin, curé